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Quid des observations de la personne mise en examen ou de son conseil avant une requalification des faits ?

Pénal - Procédure pénale
06/07/2021
Dans un arrêt du 22 juin 2021, la Cour de cassation note que, sauf si une qualification criminelle est substituée à une qualification correctionnelle, le juge d’instruction peut requalifier les faits, lors d’un interrogatoire, sans recueillir préalablement les observations de la personne mise en examen ou celles de son avocat, y compris si le quantum de la peine encourue au titre de cette nouvelle qualification est plus sévère.
Dans un arrêt du 22 juin 2021, la Cour de cassation affirme qu’« il convient de rechercher si le droit conventionnel ou le droit interne impose au juge d’instruction de recueillir les observations de la personne mise en examen ou de son conseil avant de procéder à une requalification des faits qui lui ont été précédemment notifiés lors de son interrogatoire de première comparution ou d’un précédent interrogatoire ».
 
Concrètement, l’article 6, §3, a) de la CEDH prévoit que tout accusé a droit à être informé, dans une langue qu’il comprend et d’une manière détaillée, de la nature et de la cause de l’accusation portée contre lui, et ce, dans le plus court délai. Précisément, il doit être informé de la cause de l’ « accusation », (« faits matériels qui sont mis à sa charge et sur lesquels se fonde l’accusation »), et également de la qualification juridique donnée à ces faits, de manière détaillée.
 
Selon la Cour européenne, le droit à être informé sur la nature et la cause de l’accusation doit être envisagé « à la lumière du droit pour l’accusé de préparer sa défense ». Ainsi, l’accusé doit être dûment et pleinement informé des modifications de l’accusation et doit disposer du temps et des facilités nécessaires pour y réagir et organiser sa défense sur la base de toute nouvelle information ou allégation (CEDH, arrêt du 25 juillet 2020, Mattoccia c. Italie, n° 23969/94). L’information doit dont être donnée soit avant le procès dans l’acte d’inculpation soit au cours du procès par d’autres moyens comme une extension formelle ou implicite des charges (CEDH, arrêt du 20 avril 2006, I.H et autres c. Autriche, n° 42780/98).
 
Néanmoins, l’article 6 de la Convention n’exige pas qu’au cours de l’information judiciaire, les observations de la personne mise en examen ou de son avocat soient recueillies préalablement à une requalification des faits par le juge d’instruction, les qualifications étant provisoires. En outre, l’article 80-1 du Code de procédure pénale prévoit que « le juge d’instruction n’est tenu de recueillir les observations de la personne qu’il envisage de mettre en examen et qui n’a pas déjà été entendue comme témoin assisté, que lors de son interrogatoire de première comparution ». Ce texte renvoie à l’article 116, qui garantit un débat contradictoire avant l’octroi du statut de personne mise en examen, cette formalité n’ayant pas à être renouvelée en cas de requalification des faits, l’intéressé étant déjà mis en examen.
 
Enfin, l’article 118 du Code, prévoit par exception, le recueil des observations de la personne mise en examen en cas de substitution d’une qualification criminelle à une qualification délictuelle, en raison des conséquences qui sont attachées à cette requalification au regard tant de la juridiction compétente pour connaître éventuellement des faits que du régime de la détention.
 
Conclusion : « sauf si une qualification criminelle est substituée à une qualification correctionnelle, le juge d’instruction peut, lors d’un interrogatoire, requalifier les faits reprochés à la personne mise en examen sans recueillir préalablement ses observations ou celles de son avocat, y compris si le quantum de la peine encourue au titre de cette nouvelle qualification est plus sévère ».
 
Source : Actualités du droit