<< Retour aux articles
Image

Dispense de conclusions du rapporteur public : précisions sur l’information des parties

Public - Droit public général
01/03/2023
Dans une décision rendue le 17 février 2023, le Conseil d’État a rappelé l’importance de l’information des parties en cas de dispense de conclusions du rapporteur public, et a ouvert la possibilité d’une information par d’autres moyens qu'à travers l’avis d’audience. 
Dans cette affaire, le requérant contestait une décision de la commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées de l’Essonne. Après le rejet de sa demande par le tribunal administratif, le requérant saisit le Conseil d’État.
 
Le Code de justice administrative prévoit à son article R. 711-2 que l’avis d’audience doit informer les parties de la façon dont elles pourront prendre connaissance : 
  • soit, s’il y a un rapporteur public, du sens de ses conclusions ;
  • soit, en l’absence de rapporteur, de la décision prise en son absence.
 
Cette possible absence de rapporteur est fixée à l’article R. 732-1-1, qui prévoit la possibilité pour le président de la formation de jugement ou le magistrat statuant seul de dispenser le rapporteur de prononcer des conclusions pour les contentieux relevant de certaines matières.
 
L’article R. 711-3 prévoit à son 2e alinéa : « Lorsque l'affaire est susceptible d'être dispensée de conclusions du rapporteur public, en application de l'article R. 732-1-1, les parties ou leurs mandataires sont mis en mesure de connaître, avant la tenue de l'audience, si le rapporteur public prononcera ou non des conclusions et, dans le cas où il n'en est pas dispensé, le sens de ces conclusions ».
 
Délai raisonnable avant l’audience
 
Le Conseil d’État déclare dans son arrêt rendu le 17 février 2023 que « pour l'application des dispositions de l'article R. 732-1-1 du code de justice administrative, les parties ou leurs mandataires doivent être mis en mesure de connaître, dans un délai raisonnable avant l'audience, si l'affaire sera ou non dispensée de conclusions du rapporteur public ».
 
Il confirme ainsi une décision antérieure (CE, 15 déc. 2015, n° 380634, Lebon T.), rendue au sujet d’une affaire où le demandeur en cassation faisait valoir qu’il n’avait « pas été mis en mesure de connaître avant l'audience si une telle dispense était décidée ; que l'avis d'audience qui lui a(vait) été adressé se bornait à l'informer que l'état de l'instruction du dossier pouvait être consulté sur le site de l'application " Sagace ", sans comporter les informations relatives aux conclusions du rapporteur public prévues par le deuxième alinéa de l'article R. 711-2 du code de justice administrative ».
 
Privation d’une garantie entachant la procédure d'irrégularité
 
Le Conseil avait déclaré que la méconnaissance de ces dispositions le privait d’une garantie « en ne le mettant pas en mesure de prendre connaissance de la dispense de conclusions du rapporteur public » et que le jugement avait été rendu au terme d’une procédure irrégulière.
 
Dans son arrêt du 17 février, le Conseil annonce expressément que le requérant doit être « mis en mesure de connaître » l’information, sans se référer à l’avis d’audience, laissant entendre que cette information peut être donnée par tout autre moyen. Il ajoute également la notion de « délai raisonnable », sans toutefois donner d’exemple ou de limite de ce que pourrait être un délai raisonnable.
 
En l’espèce, la demande relevait bien d’une des matières mentionnées à l’article R. 732-1-1 du CJA et pouvait donc être dispensée de conclusions du rapporteur. Toutefois, aucun élément ne permettait de démontrer que le demandeur avait été informé de la dispense de conclusions du rapporteur public. Un avis d’audience avait bien été envoyé et reçu, mais il ne figurait pas dans le dossier. Le demandeur avait également été informé « par une lettre du 24 février 2021 du greffe du tribunal, qu'il pouvait suivre l'instruction de sa requête sur le site " Sagace " ». L’absence de cet avis au dossier « ne permet pas au juge de cassation de s'assurer qu'il comportait les informations relatives aux conclusions du rapporteur public prévues par le deuxième alinéa de l'article R. 711-2 du code de justice administrative ». La Haute cour en déduit que le demandeur a été privé d’une garantie, et que le jugement a été rendu au terme d’une procédure irrégulière.
Source : Actualités du droit